Partager la publication "Démocratie or not Démocratie, That is the question…"
Chose promise, chose due. J’avais annoncé que j’évoquerai les échanges que j’ai eus avec la sous-préfecture. C’est le sujet de cet article.
Rappelez-vous : lors de la séance du 4 décembre 2020 (voir ici), en plein confinement, 2 personnes qui s’étaient déplacées pour assister au conseil avaient été invitées à rentrer chez elles. Lors de celle du 17 (voir ici), c’est 9 personnes, qui souhaitaient assister au début du conseil jusqu’à l’heure fatidique du couvre-feu, que le maire a renvoyées à la maison, refusant de démarrer la séance du conseil en leur présence.
Séance du 4 Décembre : Jm’ai planté. OK, possible, et j’en conviens ici.
Madame la sous-préfète m’a informé que mon analyse relative à la séance du 4 n’est pas bonne. En période de confinement, tout déplacement était tout bonnement interdit. Aucune obligation de retransmettre les débats non plus. Aucune obligation d’annoncer sur la convocation que la séance se déroulerait sans public. Circulez, y’a rien à voir…
Pourtant, 2 jours plus tôt, donc sous confinement, le conseil municipal d’Anduze se réunissait à 18H30. On lit sur la convocation (à lire ici) la chose suivante : « dans le contexte sanitaire actuel, la capacité d’accueil de la salle de réunion du conseil municipal est fixée à 30 personnes ». On retrouve là exactement ce que j’avais écrit au sujet de mon interprétation de la loi : « le maire peut décider de fixer un nombre maximal de personnes autorisées à assister à la séance ».
Récapitulons : St Hippo et Quissac, pour ne citer qu’elles, décident que la séance se passera sans public, mais le précisent sur la convocation. Anduze permet au public d’assister au conseil en fixant une jauge maximum. À Durfort, on ne précise rien, on renvoie les gens, et la séance se passe sans public. Et madame la sous-préfète confirme que c’est ainsi qu’il fallait faire. J’ai faux … et tous ceux qui n’ont pas fait comme à Durfort aussi : ça fait quand même du monde !
Quoi qu’il en soit, je conseille, si troisième confinement il devait y avoir :
– que tout le monde prenne le temps de bien se renseigner : la situation sanitaire justifie-t-elle qu’on ne puisse autoriser quelques personnes à assister aux conseils municipaux ?
– surtout, de ne rien accepter qui affaiblisse encore un peu plus notre démocratie.
La superficie de la salle du foyer, où se réunit actuellement le conseil municipal, est d’environ 170 m². A raison de 8 m² par personne (jauge renforcée exigée dans les commerces), 21 personnes pourraient être autorisées à investir les lieux : en plus des 15 conseillers municipaux (avec la plupart du temps 2 ou 3 absents), 6 à 8 personnes pourraient être autorisées à assister aux séances. Anduze fixe une jauge à 30 personnes. Pourquoi pas nous ?
Séance du 17 Décembre : Jm’ai planté, mais pas sur tout.
En ce qui concerne le 17, les choses sont différentes, un peu contradictoires, brouillonnes, mais différentes…
La Préfecture (Nîmes) a dans un premier temps envoyé un mail très laconique à la mairie dans lequel il est écrit : « je vous confirme que le conseil doit se tenir sans public ». Pour justifier ce propos, la Préfecture cite le texte suivant (sans en donner la référence) : « Les conseils municipaux et autres assemblées délibérantes locales peuvent se réunir sans présence du public ». À la lecture de ce mail et du texte de référence, j’ai un peu tiqué : pour moi, les mots « doivent »(interprétation de la Préfecture), et « peuvent »(texte de référence) n’ont pas la même signification.
Nous aurions donc du en rester là, selon M. le maire… Cependant, non satisfait de cette réponse, j’ai écrit à Mme la sous-préfète (Le Vigan). Voilà sa réponse : « En ce qui concerne la séance du 17 décembre, le public ne pouvait pas assister à l’intégralité de la séance. (…) Les personnes devaient quitter le conseil avant 20H00(…). » Ce qui contredit un peu la version envoyée par la Préfecture quelques jours avant.
Quel b… azar !
La situation est juste incompréhensible pour la plupart des acteurs. Depuis bientôt un an de crise sanitaire, ceux qui sont censés nous donner des consignes envoient des instructions contradictoires… Et chacun se débrouille un peu comme il peut !
Il ne s’agit donc pas de reprocher quoi que ce soit ni à la Préfecture, ni à M. le maire, mais tout ne s’arrête pas là…
Quelques personnes expulsées ce soir-là ont elles aussi écrit à la sous-préfecture pour exprimer leur désarroi face au fait que le maire leur a demandé, poliment mais fermement de quitter la salle. Dans sa réponse, madame la sous-préfète a cru bon de leur rappeler l’article L2121-16 du CGCT qui stipule que « le maire a seul la police de l’assemblée. Il peut faire expulser de l’auditoire ou arrêter tout individu qui trouble l’ordre ».
Certes, mais à condition, comme le précise l’article, qu’il y ait atteinte à l’ordre public, ce qui n’était absolument pas le cas. Lorsque les personnes présentes ce soir-là se sont vues intimer l’ordre de quitter la salle, elles étaient assises tranquillement sur des chaises. Le maire leur faisant remarquer que la distance entre les chaises n’était peut-être pas réglementaire, elles se sont empressées de s’éloigner les unes des autres en gage de leur bonne volonté…
Que penser de tout cela ?
– En période de confinement,il existe des maires qui ont fait le choix d’accueillir du public, tout en respectant parfaitement les consignes sanitaires (voir Anduze).
– En période de couvre-feu, il existe des maires qui ont fait le choix d’avancer leurs conseils municipaux pour permettre au public d’y assister (ici, ici, ici et ici). Certes, avec les nouvelles dispositions et le couvre-feu à 18H00, c’est plus compliqué. Il resterait bien le samedi matin. Notre maire aurait pu faire ce choix. Malheureusement pour nous, le prochain conseil municipal se tient le vendredi 22 janvier à 20H30 : au moins, notre municipalité a clairement l’assurance de ne plus être importunée par le public. Plusieurs citoyens ont écrit au maire pour lui demander de déplacer les séances du conseil le samedi matin. La bataille fut rude, il fallut recontacter la sous-préfecture pour obtenir confirmation de ce qui avait été dit précédemment. La réponse de la sous-préfecture accessible ici, confirme qu’ « au vu de ces éléments, la décision d’ouvrir ou non la séance du conseil municipal au public appartient donc au maire. »
Traduction: le public peut assister au conseil. La seule chose qui peut l’en empêcher est la volonté du maire. Ce que l’on appelle, en d’autres termes, le fait du prince…
Et patatras, encore un rebondissement dans cette affaire qui n’en finit pas!
Au moment où je m’apprête à publier cet article, la veille dudit conseil, je reçois un nouvel échange entre la mairie et la préfecture (à voir ici). Et tout change à nouveau… Plus le droit de recevoir du public… Remarquons au passage la subtilité: le mail de la mairie est tout sauf exhaustif dans la description de la situation: rien au sujet du mail de la sous-préfète qui dit que le public peut assister au conseil, (au passage remarquons qu’elle a donc tout faux), rien au sujet du mail du secrétaire général de la sous-préfecture (rédigé après avoir fait le point avec le bureau de la légalité et de l’intercommunalité et le SIDPC de la préfecture) qui lui aussi reconnaît la possibilité du public d’assister au conseil et qui, par conséquent, a donc lui aussi tout faux. C’est fou cet empressement de la mairie à ne pas – vouloir – recevoir du public, quand, dans le même temps, la mairie d’Anduze continue par exemple d’organiser des ateliers publics dans le cadre de sa révision du PLU… Par ailleurs, si elle ne reçoit pas de public à présent lors des conseils, tout est retransmis en direct. Idem à Aubais, pour ne citer que les deux communes que j’ai appelées ce soir… Comme me l’a fait remarquer un ami: « autres lieux, autres moeurs… »
Il en va de nos libertés !
Nous devons ensuite nous interroger sur la période que nous traversons : le plus choquant, c’est la facilité avec laquelle tant d’entre nous, citoyens et/ou élus, acceptent la dimension totalement ahurissante d’une prise de décision publique – qui se fait désormais dans l’opacité la plus totale – au prétexte que « c’est la loi ». En 1789, le premier maire de Paris, Jean-Sylvain Bailly, a eu ces mots :« La publicité est la sauvegarde du peuple. » Tout démocrate devrait exiger que la réponse à la « crise sanitaire » n’entache en rien le fonctionnement démocratique de nos institutions. Car c’est finalement la vraie question : que faisons-nous de la question démocratique ? J’y reviendrai dans une chronique ultérieure.
Le confinement général de la population au printemps a été décrété sans le moindre débat parlementaire. C’est une première dans l’histoire de France. Le Président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme Jean-Marie Burguburu a fait remarquer qu’« en temps de paix, la République n’a jamais connu une telle restriction des libertés (…) ». Voir ici.
Un état abandonne rarement les pouvoirs, à fortiori exceptionnels qu’il s’est arrogés, que ce soit au nom de notre sécurité ou du « bien de tous, à commencer par les plus fragiles ». La « crise sanitaire » suscite des attitudes et un rapport au pouvoir des plus ambigus. Nos gouvernants pourraient y prendre goût, sinon leurs successeurs… surtout si une grande partie du peuple reste aveugle devant le danger.
Nous n’en sommes pas là. Mais je suis sidéré qu’on s’accommode d’une situation tout simplement inadmissible à mes yeux, sans autre explication que « C’est la loi » ???
Restons vigilants ! N’acceptons pas tout et n’importe quoi au nom de l’état d’urgence sanitaire. Demandons des comptes aux administrations, et aux élus ! Et exigeons la transparence et la publicité de la décision publique !
À Suivre !
Légende photo du haut: La mairie de Verviers (Belgique) affiche ce principe de 1789 énoncé par Jean Sylvain Bailly, mathématicien, astronome, écrivain, président du Tiers-État et premier maire de Paris.
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